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						 PELERINAGES 
						   
						   
						   
						      GENEVE 
						1924 
						  Sur 
						recommandation du professeur S. Gunn, représentant de la 
						Fondation Rockefeller en Europe, le docteur Louis 
						Destouches est engagé par le docteur Ludwig Rajchman, 
						directeur de la Section d'hygiène de la Société des 
						Nations, en 1924. 
   Il 
						arrive à Genève le 27 juin 1924 pour signer un premier 
						contrat de travail d'une durée de deux mois. C'est le 10 
						août 1924 qu'il sera nommé pour trois ans au poste de 
						responsable des échanges de médecins spécialistes. (fin 
						du contrat au 31 décembre 1927). 
						 
 A son arrivée, Céline commence par s'installer à l'Hôtel " La Résidence " 
						(aussi nommé Pension Mathey avant 1929), route de 
						Florissant. 
 En décembre 1925, il emménagera dans un trois pièces en banlieue de 
						Genève, au 35 D, chemin de Miremont à Champel. L'année 
						suivante, il fera la rencontre déterminante avec 
						Elizabeth Craig, jeune danseuse américaine de 
						vingt-quatre ans, à Genève pour des cours de danse. Elle 
						deviendra la célèbre dédicataire de Voyage au bout de 
						la nuit... 
						  Il rédige ses 
						premiers textes et rapports en septembre 1924 et 
						organise sa première mission aux Pays-Bas en novembre, 
						qui sera suivie par d'autres déplacements à travers le 
						monde : Etats-Unis, Cuba, Canada, Belgique, France, 
						Italie (1925), Afrique et Europe (1926). 
						  Après l'expiration 
						de son contrat de travail, le docteur Destouches devient 
						collaborateur extérieur à la SDN, ce qui lui permettra 
						d'effectuer plusieurs voyages d'études : Londres 
						(février-mars 1929), Suède, Norvège, Danemark et 
						Allemagne (août-septembre 1929), Allemagne, 
						Tchécoslovaquie et Autriche (1930).  
						 
						 En 
						1928, c'est le retour en France où il s'installe comme 
						médecin à Clichy-la-Garenne, rue d'Alsace. 
 (M.G. Le Petit Célinien, 28 juin 2012).  
						   
						   
						   
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						Georges MAGNE 
						   Le 
						directeur du blog d'Agaric : chroniques du temps 
						présent; notes de lectures ; portraits ; nouvelles ; 
						poèmes etc... nous entraîne dans
						
						
						RETOUR A KORSOR
						sur les traces du célèbre exilé. Ei il nous 
						prévient :  
 " - Mais que ceux qui veulent découvrir les lieux ne tardent pas parce 
						que le temps, qui transforme et ronge les choses, 
						lentement fait son affaire. "  
   (En PDF). 
						   
						   
						   
						   ********* 
						   
						   
						   
						     
						 Céline-Albin FAIVRE  
						  " Nous ne 
						sommes venus ici (pèlerinage au Danemark), que parce que 
						l'endroit et plus précisément l'hôtel sont attachés à la 
						personnalité de Louis-Ferdinand Céline, le premier 
						écrivain qui ait autant importé pour moi et le seul 
						devant qui j'aurais des comptes à rendre si un jour je 
						devais publier quelque chose... " 
 (C'est dans son JICO (Journal Intime à Ciel Ouvert) qu'elle retrace 
						dans " les 
						
						ROSES DE 
						DECEMBRE 
						" son pèlerinage sur les traces 
						de Céline au Danemark. En PDF). 
						  
  
						   
						 
						  
						 
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								20 juillet 2018
								 
								
								                         
								
								BON  ANNIVERSAIRE  LUCETTE... 
								
								
								  
								
								Nous venions de 
								passer cinq jours à Paris pour assister au XXIIe 
								Colloque de la Société des Etudes Céliniennes, 
								ce dimanche 8 juillet 2018. Il fallait rentrer à 
								Saint-Raphaël et pour cela mon ami Gérard Silmo 
								est venu nous raccompagner pour gagner Orly. 
								 
  - " Nous avons du temps devant nous ", dit-il.  
								 
  Sa voiture sortit de Paris et se dirigea vers Meudon. Je compris sa 
								merveilleuse gentillesse quand on emprunta la 
								Route des Gardes. Nous nous sommes arrêtés 
								devant le " 25 ter ". Mon cœur alors a battu un 
								peu plus fort. On s'est approchés en silence. 
								Comme dans une église.
								
								 Je l'avais 
								tant de fois observée, admirée, en lisant et 
								relisant tous ces visiteurs illustres qui 
								composaient sa légende, cette " Villa Maïtou 
								"... 
								 
  - " Tu vois, elle est là. Les murs ont tenu en 68 ! " 
								 
  Ces trois étages, le gravier, le massif rond !... Madeleine Chapsal et 
								L'Express !... les molosses qui effraient 
								!...  là, qui caresse Bessy, ici, qui 
								descend pour aller soigner Mme Niçois... Que 
								d'images qui s'entrechoquent, qui défilent... 
								C'est une émotion... 
								
								 - " Tiens... 
								Il y a quelqu'un qui vient. " 
								 
  En effet, un homme qui sortait du côté de la maison vint ouvrir la grille 
								et rentrer le conteneur à ordures. Lui aussi fit 
								preuve d'une grande amabilité puisqu'il accepta 
								de répondre à mes questions. Il nous dit être le 
								jardinier.  
  
 - " Oui... Elle est là. Elle va bien. Elle dort beaucoup, mais elle a 
								toute sa tête !... D'ailleurs, comme il fait 
								très chaud, nous allons la sortir. Elle mangera 
								dehors... " 
  
  Il était près de midi. 
								
								 Aujourd'hui, 
								Madame, vous avez 106 ans.  
  
 C'est avec un immense respect et une formidable admiration que je me 
								permets de vous souhaiter : UN BON ANNIVERSAIRE 
								Madame Destouches... 
								                        
								                                         
								  
						  
						  
						  
								
								
								   
						 ********* 
						   
						   
						   
						    
      
						  En 
						2001, quelques années avant sa mort (27 mars 2006), 
						Pierre Monnier m'avait confié une enveloppe contenant 
						une vingtaine de photos qu'il tenait d'un couple de 
						belges, grands admirateurs de l'hôte de Meudon. 
  Ceux-ci avaient effectué, en juillet 1982, une sorte de pèlerinage à 
						Sigmaringen, sur les pas de Céline, 
						Lucette et Bébert, avec en poche la biographie de Maître Gibault pour traces de témoignages. 
  
  Il m'a semblé utile de faire connaître et de revitaliser ces clichés 
						inédits plus de 30 ans après. 
						  Je pense, en 
						effet, que retrouver des photos authentiques tels que la 
						pharmacie Hofapotheke, le Löwen, l'hôpital Fidelis, la 
						librairie Liener, l'hôtel Bären où séjournaient les 
						Rebatet, Le Vigan et Lucienne Delforge, ou découvrir le 
						sentier le long du Danube sur lequel Pétain effectuait 
						sa promenade quotidienne suivi de Bébert, ne peut 
						laisser un célinien tout à fait indifférent... 
                  
						   
						   
						   
						   
						   
						                 
						
                   
						
						Sigmaringen : l'hôtel Löwen. 
						                               
						                     
						 Le Löwen                      
						  
						   
						   
						   
						   " Ma consultation 
						!... c'était l'heure ! au premier étage du Löwen, 
						au n° 11, notre taudis... je dis taudis !... oui !... 
						deux paillasses... et quelles !... j'en ai vu d'autres, 
						certes !... bien d'autres !...  
 (...) Je vous parle énormément de W.-C.... particulièrement ceux du " 
						Löwen "... c'est qu'on était sur le même palier, la 
						porte en face, et qu'ils désemplissaient pas ! tous les 
						gens de Sigmaringen, de la brasserie, et des hôtels, 
						venaient aboutir là, forcément... la porte en face !... 
						tout le vestibule, tout l'escalier était bourrés jour et 
						nuit de personnes à bout, injurieuses, râlantes que 
						c'était la honte !... qu'ils en avaient assez de 
						souffrir !... qu'ils faisaient sous eux !... qu'ils 
						pouvaient plus !... et c'était vrai : tout l'escalier 
						dégoulinait !... et notre couloir, donc ! et notre 
						chambre ! vous pouvez pas plus laxatif que le
						Stamgericht, raves et choux rouges... Stamgericht 
						! plus la bière aigre... à plus quitter les W.-C. !... 
						jamais ! vous pensez tout notre vestibule grondant 
						pétant de gens qui n'en pouvaient plus !... et les 
						odeurs !... les gogs refoulaient ! il va de soi !... ils 
						arrêtaient pas d'être bouchés !... les gens entraient à 
						trois... à quatre !... hommes, femmes... enfants... 
						n'importe comment !... ils se faisaient sortir par les 
						pieds, extirper de vive force !... qu'ils accaparaient 
						la lunette !... " ils rêvent ! ils rêvent !... " si ça 
						mugissait !... le couloir, la brasserie, et la rue !... 
						et que tout le monde se grattait en plus... et se 
						passait, repassait la gale et morpions... et mes malades 
						!... mélimélo... qu'ils y allaient forcément aussi 
						pisser sur les autres et partout ! il était vivant notre 
						couloir !... " 
 (D'un château l'autre, Poche, 1968, p.204). 
      
						   
						   
						   
                  
						         
						   
						                                                                                                                           
						********* 
						   
						   
						   
						   
						
						    
      
						                                 Sigmaringen : la gare.
						  
		
		  
						   
						     " 
						Moi là, question Hilda, et sa bande, sûr, je les 
						retrouvais à la gare !... fatal ! espionnes, troubades, 
						ministresses, gardes-barrière, méli-mélo !... aux salles 
						d'attente ! l'attirance viande fraîche et trains de 
						troupes, plus le piano et les " roulantes ", vous 
						représentez ces scènes d'orgies ! un petit peu autre 
						chose de bandant que les pauvres petites branlettes 
						verbeuses des Dix-sept Magots et Neuilly !... il faut la 
						faim et les phosphores pour que ça se donne et rute et 
						sperme sans regarder ! total aux anges ! famine, 
						cancers, blennorragies existent plus !... l'éternité 
						plein la gare !... les avions croisant bien au-dessus 
						!... tout bourrés de foudres ! et que toute la salle et 
						la buvette se passent entre passent poux, gale, vérole 
						et les amours ! fillettes, sucettes, femmes enceintes, 
						filles-mères, grand-mères, tourlourous ! toutes les 
						armes, toutes les armées, des cinquante trains en 
						attente...
                  
						 
						 
                   
						toute la buvette entonne en chœur 
						! Marlène ! la ! la ! sol dièze ! à trois... 
						quatre voix ! passionnément ! et enlacés !... à la 
						renverse plein les fauteuils !... à trois sur les genoux 
						du pianiste ! trois de mes femmes enceintes !... et bien 
						sûr, en plus, entendu, pain à gogo ! boules ! et 
						gamelles !... et sans tickets ! vous pensez bien qu'on 
						regarde pas !... quatre roulantes pleines de marmites 
						d'un train à l'autre... de la buvette aux plates-formes 
						! le " bifur " Siegmar, je parle de trains de munitions, 
						l'endroit vraiment le plus explosif de tout le Sud-Würtemberg... 
						Fribourg-l'Italie... trois aiguillages et tous les 
						trains, essence, cartouches, bombes... de quoi tout 
						faire sauter jusqu'à Ulm !... aux nuages ! bigorner les 
						avions d'en l'air... salut !... vous imaginez que 
						j'avais un petit peu de travail lutter pour la vertu 
						d'Hilda, qu'elle se fasse pas cloquer sous un train !... 
						"                                                                                                                                                                                                        La gare.                                
						 
                                                                                                                                                                                       
                  
       
						   
						   
						    
      					 " La gare était 
						dans mes fonctions, côté sanitaire, poste de secours, 
						réfugiés... alors forcément, salles d'attente et 
						prostitution ! je devais y voir !... tout voir !... avec 
						quels moyens ?... aucun !... tout manquait !... le 
						soufre pour la gale... le novar pour la vérole... rien 
						!... les capotes ?... nib !... moi aussi je pouvais 
						cavaler !... en plus de l'Hilda !... j'avais bonne mine 
						!... je vous parle des troupes de passage, de tous ces 
						trains qui vont viennent pour des soi-disant raisons 
						!... la tradition !... tous les pays en guerre pareil, trains de troupes de 
						passage qui vont quelque part... et reviennent de 
						quelque part pour ailleurs... farandole des aiguillages 
						! poésie !... que les viandes bougent ! c'est pas qu'au 
						ciel que ça cesse pas d'aller revenir... sur les rails 
						pareil, trains sur trains... convois infinis... 
						troubades et troubades, toutes les armes et tous les 
						peuples... et les prisonniers avec !... déchaussés 
						aussi, pieds pendant hors... assis aux portières... faim 
						aussi ! toujours faim !... bandant aussi !...  
						chantant aussi " Lili Marlène " !... 
						  Monténégrins, 
						Tchécoslovènes, Armée Vlasoff, Balto-Finnois, troubades 
						des macédoines d'Europe !... des vingt-sept armées !... 
						que ça se fige pas ! que ça chante ! branle ! roule ! et 
						trains blindés, canons comme ça ! dardés géants !... de 
						ces dionosaures de canons à deux et trois locos chacun 
						!... et toujours plus de trains queue leu leu !... 
						génie, artillerie... et encore d'autres convois sur 
						convois... grives ! flopées ! pinglots hors nu-pieds et 
						poilus... gueulant qu'on leur envoie des filles !... 
						chantant qu'ils tiennent plus, qu'ils bandent trop !... 
						vous dire, un sacré point de trafic, aussi bien pour les 
						Armadas : London Munich Vienne... que pour les trains de 
						troupes et fourgons, toute la camelote, bidoche armée, 
						Frankfort, la Saxe, et l'Italie par le Brenner... que 
						c'eût été pour eux qu'un jeu, une bombe qu'ils fassent 
						éclater la gare !... marmelade !... écrabouillent tout 
						!... non !... il fallait que ça continue ! " 
						   
  
                  
      
						   
						
                  
						 
						  " Comme ça toutes les gares du 
						monde du moment que les trains de troupes stagnent... la 
						vie sur la terre a dû commencer dans une gare, une 
						stagnation... vous voyez les filles raffluer... bien 
						sûr... elle ma foutue Hilda la garce, c'était que de 
						fiévreuse puberté, pas besoin de gamelles !... costaudes 
						fillettes !... sex-appeal des salles  
						d'attente ! la perversité de voir tant de mâles arrivant 
						d'un coup, tout suants, poilus, puants... plein les 
						wagons !... et tout bandant leur crier lieb ! lieb !... 
						miracle que c'était, il faut dire les choses, que par 
						les gardes S.A. elles se soient pas trouvées happées, 
						déshabillées, et pire !... l'Hilda et sa bande, servies 
						illico ! friponnes allumeuses !... la Prévôté à la gare, 
						chargée des plates-formes, pensait qu'à coups de crosses 
						et matraques ! de ces gorilles ! ils assommaient deux 
						fois par jour tout ce qu'ils trouvaient déambulant... 
						c'était eux quand ça tournait mal, désordre aux 
						roulantes, au piano, trop de gens à travers les rails 
						que les trains pouvaient plus partir, qui ramenaient le 
						calme ! à la matraque !... et si ça rebiffait ? ptaf 
						! au Mauser !... de ces sortes de revolvers canons, 
						pas à réfléchir ! réglé ! quand la Hilda et les copines 
						voyaient les S.A.... cavalcade !... envolée de biches 
						!... mais qu'elles rebondissaient de l'autre tunnel !...
						 
						 
						 (...) Le mal que je me donnais que 
						cette foutue môme remonte au Löwen !... je 
						sentais pourtant que c'était sérieux, elle et ses 
						espiègles copines !... lutines voyoutes plein la Gare 
						!... je pouvais demander du renfort, la Prévôté !... 
						j'aimais pas avoir recours... je pensais à mes femmes 
						enceintes autour du piano et plein les sofas... qu'elles 
						bâfraient et se foutaient du reste !... des femmes à six 
						mois !... à huit mois !... des appétits doubles et 
						triples !... saucisses, bier, goulash ! je 
						pouvais pas leur donner autant !... les Prévôts les 
						assommaient ! de tous les coins de France y en avait, de 
						toutes les provinces !... pourquoi elles s'étaient 
						sauvées ?... Siegmaringen ?... indicatrices, mouches de 
						villages ?... pétasses de lieux-dits ? ou simplement 
						filles d'usines, pour voyager ?... ou leurs hommes à la 
						L.V.F. ?... ou fiancées à des boches ?... peut-être 
						guichetières de Poste-Restante ?... presque toutes des 
						certains accents... Nord, Massif Central, Sud-Ouest... 
						pas à leur poser des questions, elles mentaient sur tout 
						!... sauf une vérité : l'appétit... c'est pas le petit 
						supplément de nouilles que je pouvais leur faire avoir, 
						et la lessiveuse de raves, deux fois par semaine, qui 
						pouvaient les rassasier ! donc c'était la Providence ces 
						boules et " roulantes " comme à gogo !... j'allais pas 
						les faire pincer !... tout de même... tout de même, 
						j'avais les autres calamités !... gale, morpions, puces, 
						gonos, poux... et que ça se les repassait ! joyeusement 
						! vous auriez dit la gare faite pour !... " 
 (D'un château l'autre, Poche, 1968, p.239).  
                  
      
						 
						  
						 
						  
						 
						   La gare de Sigmaringen, 
						elle, n'avait rien d'imaginaire. C'était une longue 
						bâtisse de pierre grisâtre à un étage, nichée dans une 
						boucle de ce Danube qui avait plutôt l'allure d'une 
						grosse rivière au flot boueux et devrait attendre encore 
						un nombre respectable d'affluents et de kilomètres pour 
						mériter son qualificatif trop flatteur de « beau Danube 
						bleu ».  
  Des réfugiés français se bousculaient dans la salle d'attente, envoyés là 
						par les autorités allemandes, accueillis sur place par 
						les miliciens chargés de la police et du contrôle des 
						arrivées. Prostituées en cavale, indicateurs de la 
						Gestapo, anciennes maîtresses d'officiers S.S. et autres 
						vaincus de la guerre civile plus ou moins passibles des 
						cours de justice étaient ainsi triés et parfois refoulés 
						par l'administration débordée de la ville. C'est qu'il 
						fallait justifier plus ou moins d'un emploi pour rester 
						à Sigmaringen, cette nouvelle enclave française en plein 
						territoire allemand... 
 (Château et prison, Sigmaringen, Poésie française, www.wikipemes.com). 
                   
      
						   
						   
						   
						   
						   
						
						                                                                                                                       
						
                   
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						Sigmaringen : le Fidélis.
                  
      
						   
						   
                  
                  
						... Louis-Ferdinand Céline donnait aussi 
						des consultations au Fidélis où habitait Chamoin...
						 
  (F. Gibault, tome 3, p.47) 
						 
  
                  
      
						   
						
                  
						   (...) Ah, et 
						aussi Siegmaringen !... là, y avait urgence un peu !... 
						tous l'Article 75 au derge !... urgence, je répète ! ils 
						avaient de quoi, tous ! aussi bien nababs du Château, 
						que crevards des soupentes !... épreuve générale des 
						nerfs !... toute la Planète à la haine !... qu'ils 
						étaient monstres et pire que ça !... que pas un supplice 
						suffirait... mille et mille ! et plus ! plus !... des 
						siècles !... même mes malades du " Fidelis " qu'étaient 
						presque déjà des morts, dégoulinants de pus, tout 
						labourés de gale, 
            			 crachant 
						pancréas et boyaux, me demandaient aussi la façon de 
						finir comme un rêve... Salut !... 
  
						   (...) 
						Laval, je dois aller aussi le voir... je dois aller 
						aussi chez le Landrat... aussi Bon Dieu au 
						Fidelis !... trente... quarante alités graves au 
						Fidelis !... plus Mme Bonnard, 96 ans... et encore 
						trois !... quatre !... cinq !... six visites à l'autre 
						bout du Bourg !... j'irai !... j'irai pas !...  
						  (...) Je 
						donnais bien vingt consultations, d'une banquette à 
						l'autre... d'un ballast l'autre... et à la buvette !... 
						plus ardu là, trop de chants !... pas seulement aux 
						personnes âgées, aux civils et aux militaires... le 
						piano arrêtait jamais... ni " Lili Marlène " !... ni les 
						trains dehors... ni en l'air, le vrombissant manège " 
						Forteresse "... London Munich... Dresde... mièvrerie 
						gauloise, terreur que le ciel tombe !... un moment si 
						tout le monde s'en fout !... ganetouse, Déesse ! merde 
						pour le ciel ! grand-mères militaires !... mes femmes 
						enceintes aussi ! coquettes !... de ces arrangements 
						pour les bottes, paquets de journaux, fonds de vieux 
						feutres et ficelles et paille qu'elles pouvaient tenir 
						dehors des heures !... et sous la flotte ! 
 (D'un château l'autre, Poche, 168, p.248) 
                  
      
						   
						   
						
						   (...) En 
						fait le docteur Destouches est livré à lui-même. Pour 
						les diagnostics il ne dispose d'aucun examen 
						complémentaire. Pas ou peu d'analyses biologiques ou 
						bactériologiques, pas de radiographie. C'est la clinique 
						qui est reine avec toutes les approximations que cela 
						suppose. 
  Quelles sont les pathologies que le docteur Destouches doit affronter ? 
						Tout d'abord la gale omniprésente chez les petites gens 
						à cause de la promiscuité. Ensuite toutes les maladies 
						qui accompagnent la dénutrition et le manque d'hygiène : 
						gastroentérites, tuberculose, pneumopathies et 
						infections diverses. La mortalité est par exemple très 
						élevée surtout chez les enfants de miliciens à Ciessen.
						     Il 
						doit aussi assurer les fonctions de 
						gynécologues-obstétriciens. Un ancien couvent le 
						Fidélis était transformé en maternité et l'activité 
						reproductive ne s'était pas arrêtée loin de là comme 
						c'est en général le cas durant les années de guerre. Il 
						doit aussi faire face à des maladies vénériennes comme 
						les " chaudes-pisses " miliciennes "... 
 (Les 1142 patients du Dr Destouches, J.P. et F. Senac, Académie 
						Montpellier, avril 2010). 
                   
      
						   
						   
						   
						   
						   
						  
                                                                                                                            
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						La promenade de Pétain. 
						   
                  
						   ... Louis 
						n'eut pratiquement aucun contact avec le maréchal Pétain 
						qui, du reste ne l'appréciait pas. Le chef de l'Etat 
						croisait plus souvent Lucette dans le Château, la 
						saluant toujours très poliment.  
  Mais c'est avec Bébert qu'il eut, sans le savoir, les rapports les plus 
						suivis car l'animal accompagnait parfois le maréchal 
						dans sa promenade quotidienne le long du Danube.  
  Le vieillard ne prêtait aucune attention à ce chat qui marchait derrière 
						lui, à distance. 
 (F. Gibault, tome 3, p. 51). 
      
						   
						
                  
						   (...) Le 
						pont-levis branle... ses chaînes... ses poulies... le 
						tablier bouge... du bout tout en l'air... baisse... 
						s'abaisse tout lentement... blang ! vlang 
						!... ça y est ! il a posé !... au niveau !... là alors 
						on pouvait s'attendre à plein de larbins chargés de 
						paniers, pleins de boules, brioches, saucisses et petits 
						fours !... la distribution formidable ! 
 Zébi !... des flics qui émergent !... trois quatre d'abord... et puis bien 
						cinquante shuppos dans un gros camion gazogène... et 
						puis encore une bande de flics... une autre  
						police française !... et puis après eux... le Maréchal 
						!... oui !... lui !... Debeney à sa gauche, en 
						retrait... le général Debeney, l'amputé... mais pas plus 
						de " boules " que de beurre au chose !... la promenade 
						du Maréchal !... voilà ce qu'ils avaient attendu les 
						1142 lustrucs... vous auriez pu croire... rien du tout 
						!... qu'ils allaient l'agonir affreux... que c'était la 
						honte ! l'infamie ! pas du tout !... lui, ses 16 cartes 
						!... tout le monde le savait !... et qu'il se les tapait 
						!... qu'il en laissait miette à personne ! et que 
						c'était le fameux appétit !... en plus le confort total 
						!... créché comme un roi !... et qu'était responsable de 
						tout ! Verdun ! Vichy ! et du reste ! et de la misère 
						qu'on se trouvait ! la faute à Pétain ! à lui ! lui, 
						là-haut, soigné, comme un rêve !... tout son étage pour 
						lui tout seul !... chauffé ! quatre repas par jour ! 16 
						cartes, plus les cadeaux du führer, café, eau de 
						Cologne, chemise de soie... un régiment de flics à sa 
						botte !... un général d'état-major... quatre autos... 
						   Vous auriez pu 
						vous attendre que ce ramas de loquedus sursaute ! se 
						jette dessus ! l'étripe !... pas du tout !... juste un 
						peu de soupirs !... ils s'écartent !... ils le regardent 
						partir en promenade... la canne en avant ! et hop !... 
						et digne ! il répond à leurs saluts... hommes et 
						rombières... les petites filles : la révérence !... la 
						promenade du Maréchal !... mais pas plus de pain que de 
						saucisson... 
 (...) Vous comprenez la promenade... distances ! protocole !... pas 
						question de bras-dessus bras-dessous !... très loin !... 
						très loin les uns des autres !... le Maréchal, Chef de 
						l'Etat, très en avant, et tout seul ! son chef d'Etat-Major 
						Debeney, le manchot, trois pas en arrière, et à 
						gauche... plus loin, un ministre... plus loin encore, un 
						autre ministre... queue leu leu... séparés par au moins 
						cent mètres... et puis les flics... la procession sur au 
						moins trois kilomètres... on pourra dire ce qu'on 
						voudra, je peux en parler à mon aise puisqu'il me 
						détestait, Pétain fut notre dernier roi de France.
						 
						  " Philippe le 
						Dernier "... la stature, la majesté, tout !... et il y 
						croyait !... d'abord comme vainqueur de Verdun... puis à 
						soixante-dix ans et mèche promu Souverain ! qui qui 
						résisterait ?... raide comme ! " Oh ! que vous incarnez 
						la France, monsieur le Maréchal ! " le coup " d'incarner 
						" est magique !... on peut dire qu'aucun homme résiste 
						!... on me dirait " Céline ! bon Dieu de bon Dieu ! ce 
						que vous incarnez bien le Passage ! le Passage c'est 
						vous ! tout vous ! " je perdrais la tête ! prenez 
						n'importe quel bigorneau, dites-lui dans les yeux qu'il 
						incarne !... vous le voyez fol !... vous l'avez à l'âme 
						! il se sens plus !... Pétain qu'il incarnait la France 
						il a godé à plus savoir si c'était du lard ou cochon, 
						gibet, Paradis ou Haute-Cour, Douaumont, l'Enfer, ou 
						Thorez... il incarnait !... le seul vrai bonheur de 
						bonheur l'incarnement !... vous pouviez lui couper la 
						tête : il incarnait !... la tête serait partie toute 
						seule, bien contente, aux anges ! 
 (D'un château l'autre, poche, 1968, p.185). 
                  
                  
      
						   
						  
						  
						   (...) Je vous 
						laisse le Philippe en panne !... je vous racontais... 
						demi-tour ! le retour au Château... nous du coup on 
						passait en tête avec Marion l'Information... 
						enfin presque en tête juste derrière les Chefs de 
						Partis... ce demi-tour a donné un jour une bonne 
						rigolade... j'ai pas eu encore l'occasion de vous faire 
						beaucoup rire... au pont 
						métallique du " chemin de fer " toute la caravane 
						s'arrête pile !... sous la première arche !... oh ! pas 
						pour l'alerte ! c'était l'alerte perpétuelle... les 
						sirènes finissaient 
						
						 pas... 
						mais la R.A.F. cherchait le pont... juste le pont ! au 
						moment précis !... pas du mirage !... ils lâchaient tous 
						leurs chapelets de bombes au-dessus du pont, à pic ! 
						tout à trac !... trois quatre avions à la fois... 
						comment ils faisaient pour le louper ?... leurs 
						chapelets de bombes faisaient geysers ! le Danube en 
						bouillait ! et de ces éclaboussements de vase !... et 
						dans les labours !... trois... quatre kilomètres dans 
						les champs !... nous on était pressés sous l'arche, 
						agglomérés contre l'énorme pilier granit... c'était 
						l'occasion de pisser, tous les ministres et les Partis, 
						et le Maréchal... je connaissais tous leurs prostates... 
						certains avaient des gros besoins... pour ça, plus 
						commode, les buissons !... les voilà partis aux 
						taillis... au moment, j'ai le souvenir exact, arrive 
						dans l'autre sens, tout un détachement de prisonniers, 
						avec leurs gardes, des landsturm... prisonniers 
						et " territoriaux " pas plus nerveux les uns que les 
						autres... prisonniers russes et vieux boches... si las 
						!... si las !... aussi maigres les uns que les autres, 
						traînant la guibole... et aussi en loques !... les 
						fritz, à fusil, les autres, sans... vers où ils allaient 
						?... quelque part !... on leur a demandé... ils 
						comprenaient rien... ils entendaient même pas les 
						bombes... alors, pensez ! nous, nos questions !... ils 
						allaient la même berge que nous, c'est tout... sens 
						inverse... 
                  
						   Bridoux a eu fini 
						de pisser... il se l'est secouée... bien secouée ! et il 
						a dit : " Agissons, messieurs ! Agissons ! " agir quoi 
						?... il a donné son idée... " qu'on s'égaille ! "... 
						principe de la Cavalerie !... " en fourrageurs " !... 
						tous " en fourrageurs "... combien on était là sous 
						l'arche, tassés contre la pile ?... à peu près trente... 
						je voyais que Bridoux avait raison, les bombes 
						arrivaient plus proches... plus proches... 
 (...) Le carrousel dans l'air !... ce qu'ils voulaient, pas sorcier, 
						c'était crouler le pont !... le pont de tout le trafic 
						Ulm-Roumanie... percuter !... nous en plein dessous !... 
						Pétain et la procession ! les ministres se 
						reculottaient... ils parlaient tous à la fois... y avait 
						des " pour "... y avait des " contre "... avancer ? 
						ensemble ?... ou prendre l'autre berge ?... les 
						généraux, les amiraux, décidaient " en fourrageurs " ? 
						ou queue leu leu ? rattraper les prisonniers russes ? 
						alors à travers les luzernes ? si on restait là, une 
						chose sûre, nos têtes, qu'on prendrait le pont ! 
						totalité ! leurs bombes éclataient presque sur nous ! 
						plein le Danube !... amont ! aval !... ils rectifiaient 
						!... 
 (...) Au moment là vraiment tragique Pétain qu'avait encore rien dit... 
						l'a dit !... " En avant ! " et montré où il voulait ! " 
						En avant " !... sa canne ! " En avant ! "... qu'on sorte 
						tous de dessous l'arche ! qu'on le suive ! " En avant " 
						!... que ça se reculotte !... " En avant " !... lui-même 
						avec Debeney, dehors ! oh ! sans aucune hâte... très 
						dignes ! direction : le Château !... qu'on s'est 
						replacés la queue leu leu... tous les ministres et les 
						Partis... 
 (D'un château l'autre, poche, 1968, p. 198). 
                   
      
						   
						   
						   
						  
  
						   
						                                                                                                                          
						********* 
                  
						   
						   
						   
						  
  
						   
						                             Sigmaringen : la mairie (Rathaus). 
                  
						   
						    
						Outre cette amitié précieuse, la mansuétude de tous les 
						officiers allemands était acquise à Céline. Et il la 
						fallait très large, pour qu’ils pussent fermer leurs 
						oreilles à ses sarcasmes. Car Louis-Ferdinand était bien 
						le plus intolérant, le plus mal embouché de tous les 
						hôtes du Reich. Pour tout dire, il ne pardonnait pas à 
						Hitler cette débâcle qui le fourrait à son tour dans de 
						si vilains draps. C’était même le seul chapitre où il 
						perdît sa philosophie goguenarde, se fît hargneux, 
						méchant. Par réaction, par contradiction, 
						l’antimilitariste saignant du Voyage se 
						recomposait un passé, une âme de patriote à la 
						Déroulède. Ah ! l’aurai-je entendu, le refrain de son 
						fait d’armes des Flandres, « maréchal des logis 
						Destouches, volontaire pour une liaison accomplie sous 
						un feu d’une extrême violence », et du dessin qui 
						l’avait immortalisé à la première page de l’Illustré 
						National.  
						 
						– En couleurs… Sur mon gaye… Au galop, le sabre au 
						vent… Douzième cuirassier !... Premier médaillé 
						militaire sur le champ de bataille de la cavalerie 
						française… C’est moi, j’ai pas changé. Présent !... qui 
						c’est qui me l’a tiré ma balle dans l’oreille ? C’est 
						pas les Anglais, les Russes, les Amerlos… J’ai jamais pu 
						les piffer, moi les Boches.  
						De les voir se bagotter comme ça partout, libres, les 
						sales « feldgrau » sinistres, j’en ai plein les naseaux, 
						moi, plein les bottes !  
						 
						– Mais enfin, Louis, tu oublies. Ils sont chez eux, ici 
						!  
						 
						– J’oublie pas, j’oublie pas, eh ! fias ! C’est bien la 
						raison… Justement… Les faire aux pattes, sur place ! Une 
						occasion à profiter, qui se retrouvera pas… Au ch’tar, 
						les Frizons, tous, les civils comme les griviers. Au « 
						Lag », derrière les barbelés, triple enceinte 
						électrique… Tous, pas de détail. Voilà comment je la 
						vois, moi, leur Bochie.  
						 
						Il écumait, réellement furieux. Alors qu’il reniflait 
						des traquenards sous les invites les plus cordiales, 
						qu’il se détournait d’un kilomètre pour éviter une 
						voiture dont le numéro ne lui paraissait « pas franc », 
						il se livrait devant les Allemands à son numéro avec une 
						volupté qui écartait toute prudence. Karl Epting avait 
						projeté de constituer, pour notre aide, une Association 
						des intellectuels français en Allemagne. Un comité 
						s’était réuni, à la mairie de Sigmaringen. Céline y 
						avait été convié, en place d’honneur. Au bout d’une 
						demi-heure, il l’avait transformée en pétaudière dont 
						rien ne pouvait plus sortir.  
 (Etudes rebatiennes, Céline à Sigmaringen, Pauvert, 1976, p.220). 
						  
  
						   
                  
                  		
						Ces 
						réunions se renouvelèrent le 20 janvier 1945. Y 
						participèrent à nouveau des officiels et intellectuels 
						allemands tels que l'écrivain et journaliste Friedrich 
						Sieburg, le professeur Grimm, ainsi que nombre 
						d'intellectuels français... dont Céline. Et pourtant, 
						celui-ci ne daigne pas en parler dans D'un château 
						l'autre.  
 De même, le journal La France, si bavard et si indiscret soit-il 
						aux dires du Dr Schillemanns, s'est gardé de mentionner 
						sa participation. Peut-être en raison du scandale que 
						l'écrivain y provoqua ? 
  Dans un fragment d'une version définitive, Céline tente à plusieurs 
						reprises d'esquisser la scène d'une de ces réunions, 
						qu'il ne cesse par ailleurs d'interrompre par des 
						digressions ou autres ébauches de narration. Il est 
						d'abord question d'autocritique : 
   Ce que j'ai fait moi, et une bath, d'autocritique à Siegmaringen, 
						en pleine mairie de Siegmaringen, et devant tout 
						l'Etat-major de la haute Collaboration, Messieurs et 
						dames...  
  Ils avaient remarqué au Château que le moral des émigrés baissait de plus 
						en plus, était même dangereusement flageolant, avec 
						trois quatre alertes par nuit, les escadres de la R.A.F. 
						dans le ciel comme chez elles... (p.1045). 
						  Le moral 
						des émigrés nécessite un long exposé qui ne s'interrompt 
						qu'à la page suivante, pour reprendre l'idée d'une 
						réunion à la mairie de Sigmaringen. 
  Toujours ils eurent la grande idée, les Tout-Puissants, de réunir à la 
						mairie de Siegmaringen et dans la salle du conseil, les 
						cadres de cette horde tout en sillons et abcès tête au 
						pied et en loques, grelottant de froid et de peur... 
						(p.1046). 
 (Christine Sautermeister, L.F.C. à Sigmaringen, Ecriture, 2013). 
                   
      
						   
						   
						   
						  
  
						   
						                                                                                                                       ********* 
                  
						   
						   
						   
						  
  
						   
						                   Sigmaringen : Hof Apotheke ( la 
						pharmacie de la Cour). 
                  
						   
						   
                  
						Pour répondre à la demande de ses malades 
						le docteur Destouches n'a pas beaucoup de moyens. La 
						pharmacie de Sigmaringen est exsangue et le pharmacien 
						Karl Richter peu coopératif. Pour beaucoup de 
						médicaments le Dr Destouches doit recourir au marché 
						noir, à des approvisionnements obtenus via la Suisse par 
						des passeurs qu'il paye d'après ses dires sur ses 
						propres deniers. 
 (Les 1142 patients du Dr Destouches, J.P. et F. Senac, Académie de 
						Montpellier, avril 2010). 
						 
						 
      					
						  
						   Une ordonnance du 
						Docteur Destouches datée du 28 octobre 1944 et une 
						attestation du 30 du même mois prouvent la présence de 
						Céline à Sigmaringen avant novembre ; dressées à l'en 
						-tête de Karl Richter, pharmacien de la Hofapotheke 
						(pharmacie de la Cour), face au château, elles durent 
						être écrites juste après l'arrivée de Céline. Les 
						ordonnances suivantes porteront l'en-tête de la 
						Commission Gouvernementale. 
  (Ch. Sautermeister, L.F.C. à Sigmaringen, Ecriture, 2013). 
                  
      
						   
						
						
						    La maison fut 
						acquise en 1938 par le pharmacien Dresdner Karl Richter 
						(mort en 1946). Durant la Seconde Guerre mondiale, la 
						société allemande a dû batailler ferme à cause du manque 
						d'approvisionnement mais a été en mesure de tenir. Karl 
						Richter a essayé de préserver le caractère original de 
						la pharmacie. Après sa mort, elle est restée la 
						propriété de la famille. Après le rachat en 1957 par 
						Karl-Jörg Richter, la partie supérieure et le dernier 
						étage ont été reconstruits et rénovés en 1960-1961. Il 
						n'existait que cette seule pharmacie à Sigmaringen. 
  En 1944-1945 le régime de Vichy s'est installé à Sigmaringen. L'écrivain 
						Louis-Ferdinand Céline est venue dans la ville et a 
						fréquenté la pharmacie. Il relate cet épisode dans son 
						livre D'un château l'autre en 1957. 
						 
  Peter Bamm, employé du journal Avenir de l'Allemagne a mentionné 
						sa conversation avec les pharmaciens et probablement le 
						Docteur Schröppel qui a travaillé à la pharmacie de 1948 
						à 1952.
						  La maison qui 
						abritait la pharmacie remonte à 1705. Le bâtiment est 
						classé. Au premier étage, les pharmaciens respectifs 
						travaillaient comme médecins avec la " chambre de la 
						mort ". L'ancienne " chambre de la mort " est maintenant 
						convertie en bibliothèque. Sainte Barbara y montre une 
						peinture de plafond : Meinrad de ows.  
  Suite à la fermeture de la pharmacie, la maison est à vendre et la ville 
						de Sigmaringen discute actuellement une prise de 
						contrôle du bâtiment à des fins administratives (2015). 
						Un des plus célèbre résident y fut l'historien d'art 
						Hans Kayser le fils de Gustav Kayser. 
 (Hof Apotheke, Sigmaringen, Wikipedia). 
                   
      
						   
						  
  
						   
						   
						   
						                                                                                                                         ********* 
                  
						    
						 
						   
						   
						   
						   
						                   
						
                  
                    Portugiesische Galerie. 
						   
						  Madame Destouches 
						s'entraînait dans cette galerie, et Lucienne Delforge 
						jouait du piano. (F. Gibault). 
                  
      
						  
						
						
                   
                  
						 Je 
						connaissais très bien ce Château, dans tous les coins, 
						mais rien à côté de Lili. Lili, comme chez elle ! toutes 
						les cachettes et labyrinthes ! tapisseries truquées, à 
						personnages livrant passage, grands appartements, 
						boudoirs, armoires triple fonds, escaliers en vrilles... 
						toutes les fausses issues, tous les zigzags et les 
						paliers enchevêtrés !... devinettes à remonter 
						redescendre... le Château vraiment à se perdre... tous 
						les coins... l'œuvre des 
						siècles d'Hohenzollern... et dans tous les styles !...  
						Barberousse, Renaissance, Baroque, 1900... moi-même 
						d'une porte l'autre je me paumais... je me fascinais sur 
						les portraits, les tronches de la sacrée famille... si y 
						en avait !... corridors et statues... équestres et 
						gisants... toutes les sauces !... Hohenzollern plus en 
						plus laids... en arbalètes... en casques, cuirasses... 
						en habits de Cour... façon Louis XV... et leurs évêques 
						!... et leurs bourreaux !... bourreaux avec des haches 
						comme ça !... dans les couloirs les plus sombres... les 
						peintres se foulaient pas en ce temps-là, ils leur 
						faisaient les mêmes profils...
                  
      
						  
						
						
                   
						 
						
                  
						Çà vaut la peine, puisque 
						nous sommes en touristes, que je vous parle un peu des 
						trésors tapisseries, boiseries, 
						vaisselles, salles d'armes... trophées, armures, 
						étendards... autant d'étages autant de musées... en plus 
						des bunkers sous le Danube, tunnels blindés... 
  Combien ces princes ducs et gangsters, avaient pioché de trous, 
						cachettes, oubliettes ?... dans la vase, dans les 
						sables, dans le roc ? quatorze siècles d'Hohenzollern !
						 
 (Dun château l'autre, 1968, poche, p.163).
      
						  
						  " 
						Lucienne Delforge était au centre de toutes les 
						manifestations mondaines. Pianiste, mais aussi nageuse, 
						escrimeuse, ancien capitaine d’une équipe de 
						basket-ball, critique musicale, conférencière, écrivain, 
						cette femme avait toujours été d’une activité 
						prodigieuse. Elle avait rédigé pour le maréchal Pétain 
						un rapport sur le rôle de la musique française dans 
						l’Europe de demain et elle écrivit des critiques 
						musicales dans le journal La France. Elle était 
						demeurée très sportive et faisait de grandes excursions 
						en montagne, mais Louis n’autorisa jamais Lucette à la 
						suivre par crainte qu’elle ne soit jetée dans un 
						précipice par Lucienne qu’il soupçonnait de jalousie 
						morbide...  
  (...) Lucette et Louis assistèrent au concert de bienfaisance donné par 
						Lucienne Delforge dans la Galerie portugaise, de 
						même qu’ils étaient présents le 31 décembre 1944 à la 
						soirée de variétés donnée au profit d’œuvres de 
						bienfaisance dans la salle du Deutsches Haus. " 
 (F. Gibault, Céline. Cavalier de l’Apocalypse, 1944-1961, Mercure de 
						France, 1981).
                   
      
					
						  
						 
  
						  
						  
						  
						   
						                                                                                                                      ********* 
                  
						  
						  
						  
						 
  
						  
						                     
						
						 Sigmaringen : l'hôtel Bären. 
                  
      
						   
						   
                   
						Le « gouvernement 
						» français l’avait institué médecin de la colonie. Il ne 
						voulait d’ailleurs pas d’autre titre. Il y rendit des 
						services. Abel Bonnard, dont la mère, âgée de 
						quatre-vingt-dix ans, se mourait dans une chambre de la 
						ville, n’a jamais oublié la douceur avec laquelle il 
						apaisa sa longue agonie. Il pouvait être aussi un 
						excellent médecin d’enfants. Durant les derniers temps, 
						dans sa chambre de l’hôtel Löwen, transformée en 
						taudis suffocant (dire qu’il avait été spécialiste de 
						l’hygiène !) il soigna 
						 une série de maladies 
						intrinsèquement célinesques, une épidémie de gale, une 
						autre de chaudes-pisses miliciennes. Il en traçait des 
						tableaux ébouriffants.  
						 
   L’auditoire des Français, notre affection le ravigotaient 
						d’ailleurs, lui avaient rendu toute sa verve. Bien qu’il 
						se nourrît de peu, le ravitaillement le hantait : il 
						collectionnait par le marché noir les jambons, 
						saucisses, poitrines d’oies fumées. Pour détourner de 
						cette thésaurisation les soupçons, une de ses ruses 
						naïves était de venir de temps à autre dans nos 
						auberges, à l' « Altem Fritz », au « Bären », comme s'il 
						n'eût eu d'autres ressources, partager la ration 
						officielle, le « Stammgericht », infâme brouet de choux 
						rouges et de rutabagas. Tandis qu'il avalait la pitance 
						consciencieusement, Bébert le « greffier » s'extrayait à 
						demi de la musette, promenait un instant sur l'assiette 
						ses narines méfiantes, puis regagnait son gîte, avec une 
						dignité offensée.  
 (Etudes rebatiennes, Céline à Sigmaringen, Pauvert, 1976). 
  
                  
      
						   
                           
						 
						   Pétain, sa 
						suite, et ses ministres, quoiqu'en « grève », logent 
						dans le château de Sigmaringen réquisitionné. Tous les 
						autres sont logés dans les deux hôtels de la ville, le Bären et 
						le Löwen, qui reçoivent les plus prestigieux 
						invités, notamment l'écrivain Louis-Ferdinand 
						Céline, 
						qui en raconte plus tard les détails, à sa manière, dans 
						son livre D'un château l'autre.
						 
   Il y parle longuement de la brasserie du Löwen où les 
						Français se donnent rendez-vous pour suivre l'avancée 
						des Alliés et parler des dernières rumeurs improbables 
						sur la victoire imminente de l'Allemagne. 
 (Pierre Assouline, Sigmaringen, Gallimard, 2014). 
 
      
						   
						 
						  
						 
						    Voilà donc 
						pour les privilégiés, les gens du château. Restait la 
						piétaille, les 1 200 ou 1 500 réfugiés français 
						éparpillés dans la ville, logeant sous la tente, dans 
						des écoles, s'entassant dans les quelques auberges du 
						coin, le Bàren de la Burgstrasse non loin du 
						Danube avec son toit pointu et ses jolis colombages, l'Altem 
						Fritz ou le Lôwen de la Karlstrasse, à moins de 
						cent mètres du château et de la gare, une demeure 
						cubique et sans esprit, avec ses trophées de chasse au 
						mur, ses inévitables chopes de bière en grosse faïence 
						dans la salle à manger. La nourriture, n'en parlons même 
						pas ou mentionnons le seul Stamm-gericht, 
						spécialité nauséeuse de Sigmaringen, brouet de choux 
						rouges, de raves et de rutabagas que devait ingurgiter 
						le prolétariat de la collaboration, les rescapés du 
						Parti franciste de Bucard, les Jeunes nationaux 
						populaires de Déat ou les miliciens de Darnand, en 
						rivalité perpétuelle les uns avec les autres. 
						 
  La vie quotidienne de Céline à Sigmaringen fut des plus simple. Nommé 
						officiellement par la Commission gouvernementale 
						médecin de la colonie française, il entreprit durant 
						tout son séjour de soigner les réfugiés français, sans 
						jamais prodiguer ses soins au château, a fortiori auprès 
						de Pétain comme on l'a laissé entendre parfois. Cette 
						tâche, il la partagea avec l'un de ses collègues, le 
						docteur André Jacquot, ancien médecin de la coloniale et 
						membre du Front révolutionnaire national de 
						Marcel Déat durant l'Occupation. 
						 
  Comme Corinne Luchaire et ses sœurs, Céline, Lucette et Bébert avaient 
						été logés au Lôwen (premier étage, chambre 11), 
						tandis que Le Vigan se retrouvait au Bàren, près 
						de Lucienne Delforge, Véronique et Lucien Rebatet, 
						Infirmier, non, Le Vigan ne put décrocher ce titre. Or 
						il fallait plus ou moins justifier d'un emploi à 
						Sigmaringen, pour avoir une chambre, des tickets 
						d'alimentation. Afin de prévenir tout risque 
						d'expulsion, Le Vigan dut donc accepter peu après, de 
						très mauvais gré, le poste de speaker des informations 
						quotidiennes à la radio qu'animait Jean Luchaire. 
 (Château et prison, Sigmaringen, Poésie française, www.wikipoemes.com). 
                  
      
						 
						  
						 
						  
						 
						  
						 
						  
                  
                  
                  
						   
						                                                                                                                         
						********* 
						  
  
						   
						   
						  
  
      
						 
						                  Le cabinet de soins 
						: médecins et dentiste. 
						
						 
						 
						 
						  
						
						... Céline exerçait 
						principalement tous les après-midi, à côté du pont sur 
						le Danube, dans le cabinet du dentiste Gunther... Ce 
						même cabinet était occupé tous les matins par le docteur 
						Jacquot... 
						 (François Gibault, Tome 3, p.45). 
						 
						 
						  
						 
						   La vie quotidienne de Céline 
						à Sigmaringen fut des plus simple. Nommé officiellement 
						par la Commission gouvernementale médecin de la 
						colonie française, il entreprit durant tout son séjour 
						de soigner les réfugiés français, sans jamais prodiguer 
						ses soins au château, a fortiori auprès de Pétain comme 
						on l'a laissé entendre parfois. 
  Cette tâche, il la partagea avec l'un de ses collègues, le docteur André 
						Jacquot, ancien médecin de la coloniale et membre du 
						Front révolutionnaire national de Marcel Déat durant 
						l'Occupation. 
  
  Pour Céline et Jacquot, le travail ne manquait pas à Sigmaringen, avec le 
						froid de l'hiver, les logements précaires, la nourriture 
						insuffisante dont ce fameux Stammgericht 
						prodigieusement laxatif, la promiscuité de tous ces 
						jeunes paramilitaires, l'hygiène plus que douteuse... 
						Grippes, phtisies, otites se succédaient sans parler des 
						poux et des puces, de la gale et de toutes les maladies 
						vénériennes possibles.  
  Céline se rendait à l'ancien couvent Fidelis transformé en une 
						maternité qui ne désemplissait pas. Il tenait sa 
						consultation près du Danube, l'après-midi, dans le 
						cabinet d'un dentiste allemand qui avait été mobilisé. 
						Il distribuait à tour de bras les certificats de 
						complaisance pour ne pas renvoyer sur le front les 
						jeunes recrues de la Légion Charlemagne promis à 
						une mort presque certaine et à une défaite de toute 
						façon inéluctable. Le soir, il recevait encore dans sa 
						chambre d'hôtel transformée en salle de soin. 
						 
   Et Lucette aussi témoigne : « Nous avions une chambre avec deux 
						sommiers, pas même une table mais un tabouret. C'est là 
						que Louis recevait ses malades, surtout ceux qui avaient 
						la gale. Je lui servais d'infirmière, pour les piqûres, 
						les pansements. Mais il n'y avait pas grand-chose à 
						faire sans médicaments. Céline, avec son propre argent, 
						tâchait de s'en procurer à droite, à gauche, dans les 
						pharmacies de la ville. Il achetait aussi par 
						contrebande de la morphine qui venait de Suisse. Jamais 
						il n'a touché un centime pour ses soins. Le matin, il 
						soignait les femmes enceintes. On se levait de bonne 
						heure. De mon côté, j'allais m'entraîner au château. 
						J'avais fini par me trouver une salle glaciale au sol de 
						marbre, décorée de statues mythologiques, non loin du 
						salon de musique où s'exerçait Lucienne Delforge. » 
 (Château et prison, Sigmaringen, Poésie française, www.wikipoemes.com). 
  
						
      
						 
						  
						 
						  
						 
						  
						 
						  
						 
						  
						 
						                                                                                                                       
						********* 
						
						 
						  
						 
						  
						 
						 
  
						 
						  
						 
						  
						 
						             Sigmaringen : le cimetière, la 
						tombe de Mme Bonnard. 
  
						
						 
						 
   
						Zut, j'avais pas envie de sortir... tout de même il a 
						fallu... pas le jour même mais le lendemain... chercher 
						des rognures pour Bébert... et puisque c'était chez le
						Landrat, aller voir Mme Bonnard... je vous ai 
						dit, ma plus vieille malade, 96 ans, bien délicate 
						fragile malade... quelle gentillesse !... quelle 
						distinction ! quelle mémoire ! Legouvé par cœur, toute 
						sa poésie... tout Musset... tout Marivaux... il faisait 
						bon dans sa chambre, je restais l'écouter, je lui tenais 
						compagnie, elle me charmait... je l'admirais... pas  
						beaucoup admiré les femmes, je peux dire, dans une 
						pourtant juponnière vie... mais là je peux dire j'étais 
						sensible... je sais pas si Arletty plus tard me fera le 
						même effet... peut-être... le 
						fameux mystère féminin est pas de la cuisse... les 
						cliniques Baudeloque, Tarnier, toutes les maternités du 
						monde regorgent de mystères féminins... 
						qui pondent, saignent, avouent, hurlent ! pas mystères 
						du tout ! c'est une autre onde beaucoup plus subtile que 
						" braquemard, amur et ton cœur 
						"... mystère féminin... c'est une sorte de musique de 
						fond... oh ! pas captable comme ci !... comme ça !...
						 
						 
  Mme Bonnard, la seule malade que j'aie perdue avait cette finesse, 
						dentelle d'ondes... comme elle disait bien Du Bellay... 
						Charles d'Orléans... Louise Labé... j'ai failli avec 
						elle comprendre certaines ondes... mes romans seraient 
						tout autres... elle est partie... 
 (D'un château l'autre, poche, 1968, p.305). 
						
      
						 
						  
						 
						  
						 
						  
						 
						Céline, quant à 
						lui, qui prend soin de la mère d'Abel Bonnard - qui 
						mourra à quelque temps de là, avant le départ de son fils pour l'Espagne, 
						et dont la tombe demeurera introuvable par la suite -, 
						confiera pour sa part à Robert Poulet, à 
						
						 propos 
						de Mme Bonnard : 
   « J'étais sous le charme. Je 
						découvrais un univers spirituel où je ne suis plus 
						admis, mais où parfois je rêve de vivre. La poésie, avec 
						ses cadences heureuses, son air de danser sur un fil... 
						Les mots qui arrivent, comme appelés par un signal. Et le contraste 
						que fait cette régularité de l'expression dans la 
						liberté du sentiment avec l'inconséquence et la 
						fragilité des femmes... 
   Elle finissait une strophe, et puis elle en commençait une autre, 
						Mme Bonnard. C'était le doux courant d'une rivière
						qui vient on ne 
						sait d'où et qui va on ne sait où, le miroitement et le 
						murmure de la poésie, qui enveloppe toute la terre... » 
 (abelbonnard.free.fr, Sigmaringen et Céline). 
  
      
						 
						  
						 
						
						
						  Céline est le 
						dernier médecin de la mère d'Abel Bonnard, qu'il évoque 
						dans son livre de 1957, D'un château l'autre. 
 Elle meurt le 4 mars 1945. Il signe son acte de décès, avant qu'elle ne 
						soit inhumée au cimetière de Sigmaringen. 
  (Wikipedia, Abel Bonnard). 
  
						 
						  
						 
						  
						 
						  
						 
						  
						 
						  
						 
						
						                                                                                                                  
						*********
						
						 
						  
						 
						  
						 
						  
						 
						  
						 
						   
						 
						   
						Nos pèlerins céliniens, avant de regagner leurs 
						pénates belges, se sont retrouvés à Paris où ils n'ont 
						pas manqué, on s'en doute, de compléter leur album de 
						photos... La chambre du jeune Ferdinand au Passage 
						Choiseul, le dispensaire municipal
						de Clichy et la maison Maïtou de Meudon. 
						
						 
						  
						 
						  
						 
						   
						 
						  
						                             
						Le Passage Choiseul. 
                     
						 
						
						
						 
  
						    
						
						Le deuxième arrondissement 
						pourrait s’apparenter sans mal au cœur de la capitale. 
						C’est là que sont implantées les maisons mères des 
						banques, là qu’est érigée la Bourse. Coincé entre ces 
						glorieux édifices, le Passage Choiseul… Nul doute que 
						Céline, en le rebaptisant Passage des Bérésinas, ait 
						désiré accentuer le fossé entre deux univers qui se 
						côtoient et s’ignorent. L’ironie du sort veut qu’à 
						quelques pas de l’entrée du Passage se trouve le 
						restaurant « Drouant ». Avant l’attribution de chaque 
						prix Goncourt, les membres du jury s’y réunissent puis 
						annoncent, depuis le perron, le nouveau lauréat. Une 
						telle coïncidence prête forcément à sourire… 
						 
						     
   Il y a quasiment un siècle que Louis Destouches a 
						foulé pour la première fois le sol du Passage Choiseul. 
						L’impression étrange que presque rien n’a changé depuis 
						ce temps est saisissante. On pénètre à l’intérieur comme 
						dans un tunnel. Des grilles métalliques sont enroulées 
						sur elles-mêmes à hauteur de chaque porte. Si l’on 
						emprunte l’entrée débouchant rue du 4 septembre, on peut 
						admirer un imprimé fatigué, sous verre, exposant le 
						« Règlement intérieur du Passage Choiseul ». 
   En se 
						penchant un peu, on découvre une borne présentant 
						l’histoire de Paris. En conclusion de ces quelques 
						lignes consacrées au Passage, il est écrit que 
						« l’enfance de Louis-Ferdinand Céline s’écoule au 67 
						puis au 64 ». La mairie de Paris fait preuve de plus de 
						clémence et de mansuétude quand il s’agit du petit Louis 
						que quand il faut affronter les colères soulevées par 
						l’ambigu Ferdinand. Cette borne constitue l’unique 
						indication officielle concernant Céline… Maigre 
						consolation quand on sait que pour lui rien ne s’est 
						véritablement « écoulé » mais que tout s’est subi.
       
					
						
						«  
						Pour parler de notre Passage Choiseul, question du 
						quartier et d’asphyxie : le plus pire que tout, le plus 
						malsain : la plus énorme cloche à gaz de toute la Ville 
						Lumière !… trois cents becs Auer permanents ! … l’élevage 
						des mômes par asphyxie ! » 
   (Dun château l'autre).
						 
					
						
      					
						« Moi, j’ai été élevé au passage Choiseul dans le gaz de 
						250 becs d’éclairage. Du gaz et des claques, voilà ce 
						que c’était, de mon temps, l’éducation. J’oubliais : du 
						gaz, 
					
						des claques et des nouilles. Parce que ma mère 
						était dentellière, que les dentelles, ça prend les 
						odeurs et que les nouilles n’ont aucune odeur. »
						 
  
						(Cahiers Céline 2, p.62).
						 
						
          
						
						
						La peinture couvrant les façades des appartements, d’un 
						beige passé, est fissurée. Ici et là, quelques 
						moisissures ornent les murs lézardés. Les personnes qui 
						traversent ce couloir paraissent pressées de retrouver 
						l’air libre au plus vite. Chaque parole échangée, chaque 
						bruit de pas résonne, monte et s’écrase contre la 
						verrière s’ouvrant sur le ciel. La lumière n’est pas 
						tout à fait celle du jour, pas tout à fait artificielle. 
						    Au 67, sont installées les loges des comédiens du 
						théâtre des Bouffes Parisiens. Derrière la vitrine du 
						numéro 64, on vend désormais des vêtements. Ici, on a 
						évidemment entendu parler de Louis-Ferdinand Céline, 
						mais il est hors de question de laisser quiconque 
						emprunter l’escalier en tire-bouchon menant jusqu’au 
						troisième étage. « On a même refusé pour la Bibliothèque 
						Nationale en 94, alors… Ce serait un constant 
						va-et-vient… On a les bureaux là-haut… On travaille 
						nous… » 
						     
   Inutile de tenter d’expliquer à quel point Céline a 
						œuvré pour la postérité du Passage Choiseul, même 
						lorsqu’il ironisait dans certains entretiens sur le fait 
						que l’on puisse voir en lui l’écrivain censé 
						l’ « incarner ». Aucun des lecteurs de 
						Mort à crédit ne 
						peut déambuler dans cette artère sans entrevoir 
						Ferdinand, sans entendre les fureurs d’Auguste, sans 
						éprouver l’oppression de la « cloche à gaz ». Les becs 
						d’éclairage et les chansonniers ont disparu mais l’œuvre 
						est restée, intacte, vivante. Depuis 1936, aucun 
						écrivain n’a osé supplanter la vision célinienne du Passage, et il est fort à parier que cela dure de très 
						longues années encore… 
      					
						 
 
						   
						
						« En 
						haut, notre dernière piaule, celle qui donnait sur le 
						vitrage, à l’air c’est-à-dire, elle fermait par des 
						barreaux, à cause des voleurs et des chats. C’était ma 
						chambre, c’est là aussi que mon père pouvait dessiner 
						quand il revenait de livraisons. » 
  (Mort à crédit).
						 
						
						
						« […] moi qu’ai vécu Passage Choiseul, dix-huit ans, je 
						m’y connais un peu en sombres séjours ! … » 
   (D'un château l'autre).
					
						   
			
						   
						  
						  
						  
						
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						Le dispensaire municipal de Clichy.
						
						 
						  
						
						
						   
						En janvier 1929 s'ouvre le dispensaire de Clichy, rue 
						Fanny. Céline, grâce à ses nombreux appuis (le docteur 
						Rajchman, le professeur Bernard notamment) y trouve un 
						emploi qui l'amène a abandonner sa clientèle de la rue 
						d'Alsace. Contrairement à ce qui a pu être affirmé, 
						Destouches n'était pas le médecin chef de Clichy, même 
						si il convoita un temps le poste. Dans ce dispensaire 
						travaillait une douzaine de médecins, avec à leur tête, 
						le docteur Grégoire Ichok qu'il décrira en ces termes : 
						« Au dispensaire municipal sur lequel je m'étais 
						rabattu, je vis arriver un certain Idouc (sic), 
						lithuanien (...) imposé par les dirigeants communistes 
						(...) La direction du
						 dispensaire, 
						confiée à ce médecin probablement faux, n'étant sans 
						doute qu'un camouflage ». 
  Espion ? Véritable docteur ? Ce qui est sûr, c'est qu'il fut mal aimé de 
						la plupart des médecins du dispensaire et ses relations 
						avec Céline iront en se détériorant. Pendant neuf ans, 
						toutefois, Destouches tiendra au dispensaire des 
						vacations régulières de médecine générale, vingt deux 
						heures de consultation par semaine payées 2000F par 
						mois, selon F. Balta, jusqu'à sa démission en 1937.Ce 
						dispensaire est un des premiers à offrir des 
						consultations et quelques examens gratuits. C'est ici 
						que le docteur Destouches fera, pour la première fois, 
						la véritable expérience de la misère des banlieues. Il y 
						travaillera pendant neuf ans, laissant le souvenir d'un 
						médecin enthousiaste, généreux, « de bon diagnostic » 
						mais utilisant peu de médicaments.  
						 
   Ces occupations médicales diverses n'empêchent pas le docteur 
						Destouches de publier, en 1932, le Voyage au bout de 
						la nuit. De même, son activité littéraire naissante 
						ne changera pas grand-chose à son activité au 
						dispensaire, la plupart de ses patients, d'origine 
						modeste, ne sachant pas qui les soigne. De plus, Louis 
						voyage sans arrêt : il a ainsi découvert, début 1929, la 
						médecine de dispensaire en Allemagne, en Angleterre ou 
						en Scandinavie grâce à des bourses fournies par le 
						comité d'hygiène de la SDN, au sein duquel il a conservé 
						de bonnes relations, notamment avec le docteur Rajchman.
						 
   
   Ses relations lui ont ainsi grandement facilité la tâche pour 
						accomplir ces nombreux déplacements. Il en rapporte son 
						dernier texte médical, « Pour tuer le chômage, 
						tueront-ils les chômeurs ? », publié en 1933. Là 
						finit tout contact apparent avec le comité d'hygiène de 
						la Société des Nations. On ne sait pas exactement 
						ce qui arriva, toujours est il que Destouches, malgré le 
						certain respect qu'il accordait au Dr Rachjman, se fâcha 
						avec ce dernier à la parution, en 1933, de l'Eglise, 
						pièce qui tourne en  
						dérision l'organisation et le fonctionnement de 
						l'institution, où s'exprime déjà, bien qu'encore larvé, 
						son antisémitisme.  
   Là se tiennent sans doute les raisons de son départ. Au sein du 
						dispensaire de Clichy, ce sont également ses positions 
						politiques qui détérioreront ses relations avec le 
						personnel et prendront une part prépondérante dans son 
						départ. Parti en URSS réclamer les droits d'auteur sur 
						le Voyage au bout de la nuit aux éditeurs 
						soviétiques du roman, Céline, sans prendre garde au fait 
						que la commune de banlieue où il exerce a pour maire et 
						pour édiles des communistes militants, se répand en 
						propos sarcastiques, un peu provocateurs sur les 
						nouvelles institutions russes. Cela n'a pas été sans 
						conséquence... D'autant que son remplaçant se trouva 
						être un médecin juif fraîchement naturalisé... Il n'en 
						fallut certainement pas beaucoup plus à Céline pour 
						englober dans une réprobation générale juifs, 
						communistes, socialistes et gouvernement Blum. Une 
						petite série de hasards aux graves conséquences : en 
						1937, Destouches, devenu Céline (son pseudonyme 
						d'écrivain) depuis le Voyage au bout de la nuit, 
						encore écœuré par les 
						souvenirs de la première guerre mondiale, et sentant 
						l'approche imminente d'un nouveau conflit écrivit 
						ensuite ce texte pacifiste mais foncièrement antisémite 
						qu'est Bagatelles pour un massacre. 
						  (L.F.C. : une pensée médicale, D. Labreure, 
						Université Paris 1, 2005).
						
         
      
						 Le 14 novembre 1927, Louis-Ferdinand Destouches ouvre un 
						cabinet de médecine générale, maladies des enfants au 
						1er étage du 36, rue d’Alsace. Il loge dans un 
						appartement de 3 pièces et salle de bain. Dans l’une des 
						pièces, il y a le cabinet médical et une salle d’attente 
						située juste au-dessus de la boucherie Fouilloux. [rue 
						du Bois ou Henri Barbusse] Destouches et sa femme sont 
						chassés par une invasion de punaises dans l’immeuble, 
						fin août 1929. Il a pris un nouveau logement au 98 rue 
						Lepic, à Montmartre. 
  Après un stage à l’hôpital Laennec où il est initié à la médecine de 
						dispensaire par le professeur Bernard, la direction de 
						la médecine d’hygiène populaire lui offrit pour 2 000 
						francs par mois une vacation quotidienne de médecine 
						générale au nouveau dispensaire 10, rue Fanny. Il y 
						entra dès son ouverture le 8 janvier 1929 et partit le 
						31 décembre 1937. 
						 
  Deuxième témoin important, Eliane Bonabel, née à Paris, vit avec son 
						oncle Charles et sa grand-mère Célina au 63, boulevard 
						National (43, boulevard Jean Jaurès aujourd’hui).
						 Elle 
						fait partie des nombreux enfants qui sont venus au 
						centre de santé rue Fanny. Le docteur Destouches l’a 
						rencontrée pour la première fois à l’âge de 5 ans
						(événement qui confirme l’arrivée du médecin-écrivain à 
						Clichy en 1925-1926). À 9 ans, Eliane fait un dessin 
						pour le docteur. Il est tellement impressionné qu’il lui 
						donne 200 francs pour l’encourager. À la sortie du livre 
						de Louis-Ferdinand Céline, Voyage au bout de la nuit, 
						en 1932, Eliane Bonadel alors âgée de 12 ans, s’en 
						inspire pour l’illustrer de 21 
						dessins. Quant on sortait de son cabinet, le docteur 
						Destouches donnait ses dernières recommandations « pas 
						d’alcool, vie saine et propreté » . C’était un médecin 
						hygiéniste ! 
 (www.ville-clichy, JP.Capdet). 
						 
  
						
      
					 
						
					
						   
						Le 14 novembre 1927, Louis-Ferdinand Destouches 
						emménageait à Clichy avec Elisabeth Craig, dans un trois 
						pièces au 1er étage du 36 rue d'Alsace. Jeanne Carayon, 
						voisine de palier et première secrétaire de Céline, se 
						souviendra de leurs disputes en anglais. Il y ouvrait un 
						cabinet de « Médecine Générale, maladies des enfants ». 
   Le 8 janvier 1929, suite à l'échec de son cabinet, la direction de 
						la médecine d'hygiène populaire proposa au docteur 
						Destouches une vacation quotidienne de médecine 
						générale, au tout nouveau dispensaire de Clichy, situé 
						au 10 rue Fanny. Il accepta et fit ainsi partie de 
						l'équipe fondatrice du dispensaire de la Ville, jusqu'à 
						son départ le 31 décembre 1937, année de parution de 
						Bagatelles pour un massacre. 
						 
  Au printemps 1931, Louis-Ferdinand Céline écrira Voyage au bout de la 
						nuit (prix Renaudot), dactylographié par Aimée 
						Paymal, secrétaire du dispensaire de Clichy et, dans 
						lequel il décrit la Garenne-Rancy en référence à la rue 
						d'Alsace, la rue Simmoneau et le boulevard Victor Hugo, 
						ainsi que les habitants du quartier Victor Hugo. 
  (Le Petit Célinien).
						
						  
						
						  
						
						  
						
						  
						
						  
						
						                                                                                                                     
						********* 
						
						  
						
						  
						
						 
  
						
						  
						
						 
						    Depuis que j’ai 
						assisté à l’émission de Guillaume Canet et que l’on a 
						parlé de Céline, j’ai toujours en tête de connaitre la 
						maison où il a vécu à Meudon. 
						 
 Beaucoup de personnalités ont vécu à Meudon, là où j’habite. Je connais la 
						Maison de Rodin « la Villa des Brillants » sur les 
						hauteurs de Meudon, la Maison d’Armande Béjart, rue des 
						Pierres, tout à côté de mon immeuble, la Maison où à 
						vécu Richard Wagner, en bas de l’avenue du Château. 
						 
 Maintenant je vais connaître la Maison de Céline, 25 ter Route des Gardes. 
						 
 Il est 13h quand je quitte mon appartement à Meudon. Il fait bon dehors, 
						je vais y aller à pied. 
						 
  Juste au-dessus de chez moi je prends la magnifique avenue du Château. 
						Sur toute une partie de l’Avenue à ma droite la vue sur 
						Paris m’accompagne, de la Seine au Sacré Cœur. 
						  En contrebas j’aperçois le Potager 
						du Dauphin. L’Avenue est bordée d’arbres et de 
						magnifiques propriétés. Je passe devant la Maison de 
						Richard Wagner en bas de  l’Avenue du Château. Me voici 
						arrivée en bas de l’Avenue, la Route des Gardes 
						la coupe, je me dirige sur la droite pour l’emprunter
						Je vais en descendre une bonne partie, je 
						passe au-dessus de la voie de chemin de fer, je reste 
						sur ma droite côté des numéros impairs. 
						 
 Je ne suis pas loin maintenant, je dois emprunter un chemin à droite et 
						tourner tout de suite à gauche, la maison est située en 
						surplomb de la route. Je monte le petit chemin qui 
						m’amène au 25, j’ai trois propriétés à passer et 
						j’arrive au bout de ce chemin. 
						 
  Rien ne m’indique que je suis à la Maison de Céline, les 
						trois propriétés se ressemblent. Je m’arrête donc à la 
						dernière maison, au numéro 25. Il n’y a pas de 25ter, je 
						pense être devant la maison de Céline. Elle se situe au 
						fond d’un parc, elle comprend trois étages de fenêtres 
						avec des volets bleu ciel. La grille est bleu clair et 
						un peu rouillée. (Elle ressemble bien à la photo que 
						j’ai vue sur internet). 
						 
  Je passe mes mains entre les barreaux de la grille pour pouvoir faire des 
						photos. Je reste un instant devant la propriété de 
						Céline, un peu émue, je la contemple, elle parait 
						vieille. Un chat se promène dans le parc et s’approche 
						de la grille. C’est peut-être le chat de Céline ? 
						 
  Pour être sûre je descends de ce talus et reprends la Route des 
						Gardes. Un peu plus bas je vois un homme dans la 
						cour d’une propriété, je m’avance vers lui et je lui 
						pose la question : « connaissez vous la Maison de » je 
						n’ai pas le temps de finir ma phrase il sait que je 
						cherche la Maison de Céline. Il me montre le talus et il 
						me dit, c’est la première maison perchée. Alors je lui 
						fais voir mes photos et il me dit : « c’est exactement 
						la Maison de Céline que vous avez prise en photo ". 
						 
  Il me fait voir sur ma photo où se situe la chambre de la femme de 
						Céline, Lucette, qui vit toujours dans la maison. " Je 
						suis son jardinier " me dit-il. Lucette aura 101 ans 
						cette année, on va lui souhaiter son anniversaire le 20 
						juillet (drôle, le 20 juillet c’est aussi l’anniversaire 
						de mon fils). Puis il ajoute « Toto est toujours là ». 
						Ah, je lui demande qui est Toto. Il me dit : « son 
						perroquet ». 
						 
 Alors je lui demande pourquoi il s’appelait « Céline ». (Ce nom me faisait 
						toujours penser à une femme). Il me dit qu’il avait pris 
						le nom de sa grand-mère. 
  (blogdefrancine, Paris et People, la maison de Céline, 11/03/2013).
						 
       
						 
						   Meudon, octobre 1951. 
						Rentrés d'exil, Céline, sa femme Lucette, Bébert - ainsi 
						que deux autres chats et une chienne recueillis au 
						Danemark - prennent leurs quartiers sur les hauteurs de 
						Meudon. A mi-pente du coteau, la villa Maïtou a 
						appartenu à Labiche. Quel clin d'œil 
						!  
  De ce domaine, constitué d'un pavillon ceint d'un jardin pelé que seuls 
						les chiens laboureront, Céline fera un ermitage mais 
						aussi un théâtre. Il endosse à plaisir le rôle de 
						l'écrivain réprouvé. 
   A 57 ans, il lui tarde de se remettre au style et, après le 
						purgatoire dont le tireront Marcel Aymé et Roger Nimier, 
						de renouer avec le succès. « Le langage écrit était à 
						sec, soutiendra-t-il dans ses Entretiens avec le 
						professeur Y (parus en 1955, une année avant la mort 
						de Léautaud, son concitoyen de Meudon), c'est moi qu'ai 
						redonné l'émotion au langage écrit. » 
						   
 Céline était voyeur, rappelle son 
						biographe François Gibault. Assez voyeur pour justifier 
						cet album d'une centaine de photographies, réunies par 
						David Alliot, qui montrent dans quelle animalerie - du 
						perroquet Toto au hérisson Dodard - Céline acheva son
						œuvre, de Féerie à 
						Rigodon. Entre les aboiements, les notes de piano et 
						le silence trop tôt dissipé du lointain matin, d'avant 
						le pire à venir.  
 (lexpress, culture, livres, Céline à Meudon, 2006). 
 
						  
     L'âme de 
						Meudon
						  
  Une grille bleue écaillée, 
						un jardin en pente raide égayé de tulipes, 
						sur les hauts de Meudon. La ville Maïtou, un 
						pavillon de style Louis-Philippe offre au regard 
						une façade grise, hérissée de fissures. Des gouttières 
						de guingois. Derrière, c'est un chaos d'herbes folles et 
						de myosotis. Un univers hitchcockien.  
  Lucette et Céline s'y sont installés en 1951 au retour de six ans d'exil. 
						Jusqu'à sa mort, l'écrivain y a alimenté sa légende, 
						ermite, dépenaillé entouré de chiens, de chats et du 
						perroquet Toto.  
  Aujourd'hui, les traces de sa présence s'estompent : des photos intimes, 
						des portraits punaisés aux panneaux de liège...
						 
 " Cette maison est comme moi... 
						Elle tient le coup, mais il ne faut pas trop lui en 
						demander ! " lance Lucette. De longs cheveux blancs 
						encadrent son visage étonnamment juvénile. Elle se tient 
						à demi allongée, dans le salon du rez-de-chaussée où 
						elle ne descend que pour dîner. Elle a mis du rouge à 
						lèvres. Son pied nu de danseuse s'échappe d'une 
						couverture. Un chat se faufile. Près de la fenêtre, une 
						cage abrite Toto 2, le perroquet.
	  
						 
  " Elle a une spatule pour le faire 
						taire, mais elle ne s'en sert jamais ", sourit David Alliot, nouveau membre de la " secte dans la secte " : 
						les derniers visiteurs de Meudon. Cette poignée de 
						fidèles la protège encore des vautours rôdant autour du 
						fantôme. Elle les accueille d'un " Raconte, raconte " 
						gourmande d'une vie dont elle s'est retirée depuis 
						quinze ans. 
 (lejdd, société, actualité, Lucette ombre et lumière, 2012).  
						 
 
                                              
                                                                              
                                                                                
               
                         
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